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samedi 21 avril 2012

"Chronique de la dérive douce" de Dany Laferrière


J'ai fini ce livre hier soir.

Quatrième de couverture
Un jeune homme du Sud arrive dans une ville du Nord.
On le voit dériver dans les rues d'un monde si neuf.
Par petites touches singulières, il tente de savoir où il se trouve.
Si L’Énigme du retour (Grasset, prix Médicis 2009) était le roman du retour à Port-au-Prince de Dany Laferrière, Chronique de la dérive douce relate son arrivée à Montréal, à l'âge de 23 ans.

Mon avis
Je suis tombée involontairement dans une période où les genres se mélangent. D'abord avec Merci, de Daniel Pennac, qui se présente sous la forme d'un roman, mais qui concrètement tient davantage du théâtre. Ensuite avec Un assassin blanc comme neige, qu'on peut assimiler à de la prose poétique. Enfin, avec cette Chronique de la dérive douce, qui tient elle aussi de la prose poétique. Une prose moins poétique, dans l'absolu, que la précédente, mais qui d'un point de vue formel fait vraiment penser à de la poésie : nous n'avons pas de vraies lignes, plutôt des vers libres, et un refrain revient, entêtant, celui de l'Africain qui affirme au narrateur qu'il est arrivé trop tard.
En dépit de cette forme particulière, il s'agit clairement d'un roman, et plus précisément d'un roman d'initiation. Comme je l'ai vu écrit sur un blog, ce roman d'initiation "relate à la fois une entrée dans la ville et une entrée dans la vie." Ces deux entrées, qui font suite à un exil, frappent par leur dureté, qui contraste avec la naïveté première du narrateur. Durant cette épreuve, il aura trois soutiens : la littérature, l'alcool et les filles.
Un roman qui se lit sans accrocs, mais où il ne faut pas hésiter à faire des pauses pour ne pas saturer.

Extrait n°1
Le chauffeur de taxi ouvre la radio.
Une voix haut perchée
annonce la présence en ville
de rock-stars, de mannequins,
et autres dieux du stade.
Il éteint le poste en murmurant :
"C'est Babylone."

Un homme complètement nu
courant sur le trottoir.
Les policiers font semblant
de ne rien voir.
La foule applaudit.
"Sodome" dit le chauffeur.

Extrait n°2
Je suis allé ce matin au bureau de dépannage des
immigrés sur la rue Sherbrooke. Le type qui
s'occupe de mon dossier m'a dit que si j'acceptais
de déclarer que je suis un exilé, et non un
voyageur comme je m'obstine à le répéter, il
pourra me donner soixante dollars au lieu des
vingt qu'il distribue aux immigrés. Je
n'ai pas été exilé, j'ai fui avant d'être tué.

On ment en Haïti pour
survivre, et ça je peux
le comprendre, mais
qu'on ne nous demande
pas de mentir ici aussi.
A peine sur le trottoir,
j'ouvre l'enveloppe pour
trouver cent vingt dollars.
Juste assez pour me louer
une chambre
dans ce quartier ouvrier.

4/5
Un bon moment de lecture

2 commentaires:

  1. C'est bien la première fois que j'entends parler de ce livre, mais tu me donnes envie de le découvrir !

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